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LOGEMENT : « LE TERRITOIRE DOIT FAIRE SA REVOLUTION CULTURELLE ! »

LOGEMENT : « LE TERRITOIRE DOIT FAIRE SA REVOLUTION CULTURELLE ! »

Interviewé par Mediabask (édition hebdo du 28/10/21), Paxkal INDO, président du Conseil de développement du Pays Basque (CDPB) exprime le regard porté collectivement au sein du CDPB sur les défis du logement.

Mediabask :Comment expliquer à ce jour que des communes du Pays Basque Nord soumises à la loi SRU (25% de logement social) ne la respectent pas ?

Paxkal Indo :  En Pays Basque, seule Bayonne et quelques autres communes ont réellement une histoire ancienne du logement social, avec l’accueil d’une population très diversifiée. Depuis 20 ans, le Pays Basque a connu une explosion des prix de l’immobilier : on ne produit pas assez de logement pour répondre aux besoins spécifiques de la population (jeunes, familles recomposées) alors que la population augmente. Des communes qui ont une histoire plus touristique ou rurale se sont retrouvées, en peu de temps, face à des problématiques urbaines et sociales tout à fait nouvelles pour elles. Il se rajoute à ce contexte des questions culturelles : en France, et particulièrement en Pays Basque, il existe un véritable culte de la propriété privée, avec le modèle (ou le mythe) de l’etxe. Et à l’inverse, un manque de culture de l’aménagement public et du logement collectif. Avec la pression immobilière, les communes ont eu comme réflexe d’ouvrir leur carte communale (ou PLU) à l’urbanisme et, dans ce contexte, ce sont les promoteurs privés qui ont pu s’adapter rapidement y compris dans les communes de plus de 3500 habitants où la loi SRU s’impose. Mais attention : le besoin en logement concerne quasiment tout le territoire. Le logement social n’est qu’une partie de la réponse, qui doit inclure une politique plus vaste de régulation des prix du foncier et de l’immobilier.

Si les élus locaux se sont saisis du problème ces dernières années, ils n’ont pas suffisamment franchi le pas d’une production publique volontariste qui passe par la maîtrise publique du foncier et la mobilisation des bailleurs sociaux. Le territoire doit faire sa « révolution culturelle » !

Nous avions fait des propositions fortes en amont de l’élaboration du PLH (plan local de l’habitat)* qui affiche une montée en puissance de cette production publique.

Mediabask : Les outils réglementaires (PLU, ZAD, préemption, expropriation…) sont-ils vraiment efficaces dans un contexte où les lois sont peu contraignantes, envers la spéculation notamment ? 

Paxkal Indo : Sans attendre de nouvelles lois et de nouveaux dispositifs, utilisons les outils existants à plein régime ! Avec les outils que vous citez, les élus peuvent : imposer des règles et des taux de logement social, développer des zones dédiées sous maîtrise publique, utiliser la préemption ou l’expropriation quand c’est nécessaire. Un autre outil appartient aux décideurs locaux : l’Etablissement Public Foncier (EPFL) du Pays Basque, dont le Conseil de développement est à l’origine.

Seule une stratégie foncière permettra aux opérateurs publics et privés de produire du logement à prix abordables. Aujourd’hui, la production de logement social ne freine pas la hausse des prix, car les opérateurs reportent le surcoût du logement social sur les autres logements qu’ils produisent. Donc, les prix s’envolent !

Une stratégie foncière, c’est aussi préparer l’avenir en stockant du foncier pour du plus long terme. C’est écrit dans la feuille de route de l’EPFL, mais à ce jour les crédits publics ne sont pas mobilisés pour le faire.

Mediabask : Comment empêcher que des logements en accession à la propriété soient de nouveau soumis à la loi du marché une fois les délais de la clause non spéculative passés ? 

Paxkal Indo : Jusqu’ici ces logements pouvaient être revendus par leurs propriétaires au bout de quelques années au prix du marché, alors qu’ils avaient bénéficié de l’effort public pour y accéder. Avec le Bail Réel Solidaire (BRS), on a enfin une solution nouvelle et intéressante pour produire du logement équivalent à de l’accession sociale à la propriété et qui le demeurera au fil du temps. C’est un moyen de limiter le retour au marché et à la spéculation de ces logements. C’est une voie à généraliser.

En revanche, le BRS ne doit pas devenir le seul outil de production de logement social. Le parc locatif social géré par les bailleurs sociaux reste crucial et doit demeurer la ou sinon l’une des grandes priorités de l’action publique : c’est vital pour une parte de la population de plus en plus précarisée.

 

 

 

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